Où est le sens ?
Nombre d’agents, mais aussi de cadres et de responsables, se plaignent de perdre le sens du travail, des actes de la vie professionnelle. C’est un signal important qui peut se traduire par un épuisement pouvant aller jusqu’au burn out, par des tensions dans les services alimentant stress, voire agressions et harcèlement, et in fine par le départ d’agents pour d’autres hôpitaux ou pour des changements de métier. Nous devons donc tout faire pour éviter cet énorme gâchis humain.
D’où vient cette perte de sens ? Sans doute est-elle multifactorielle : une situation chronique de pénurie de moyens humains, le stress collectif lié à la crise covid et aux évènements dramatiques survenus dans l’institution (décès de patient, incendie), mais aussi, j’en ai bien conscience, les nombreuses réorganisations intervenues depuis deux ans, qui génèrent leur lot de craintes avant de montrer des effets bénéfiques. Dit autrement, ces réorganisations visent à répondre aux défis que Camille Claudel doit relever, mais elles alimentent elles-mêmes un trouble supplémentaire dans l’esprit collectif.
Il est donc important de dire clairement que nous ne sommes pas dans un perpetuum mobile, et qu’une pause est à présent nécessaire pour stabiliser le nouveau modèle d’organisation et pour en afficher clairement le sens, une fois menés à terme les projets d’ouverture de Moreau de Tours, de réorganisation des urgences psychiatriques et de création de l’HAD.
Quel est le sens de notre stratégie ? D’abord et avant tout, il s’agit d’élargir la prestation dûe aux patients : bien sûr la prise en charge, en limitant l’hospitalisation au strict besoin, mais aussi l’accompagnement vers l’autonomie, et le respect de la personne en toute circonstance. Corrélativement, il faut organiser les équipes en tenant compte de la pénurie de temps médical, en arrêtant de croire qu’elle est temporaire : donner à l’encadrement soignant les moyens d’assurer l’armature du fonctionnement des services, à défaut d’une armature médicale, et renforcer la présence de compétences charnières comme celles des IPA, de neuro-psychologues, etc.
Bien sûr, ce sens global se dilue au quotidien, il se heurte à des incohérences, à des outils inadaptés, à tout un contexte complexe et fragile, qui font que les actions contredisent trop souvent les intentions. Il est donc important de réaffirmer les principes, et d’analyser les difficultés d’application pour essayer de les résoudre.
Le management s’est mobilisé de façon remarquable durant tous ces mois de crise et de réorganisation, et j’en remercie très chaleureusement tous les cadres. Ils sont toujours à la manœuvre actuellement pour finaliser, avec les équipes, les projets de service, dont l’ambition est vraiment de traduire les objectifs que nous voulons collectivement pour l’hôpital de demain.
Le sens sera là.
Roger ARNAUD